Chaude ambiance au stade Roland-Garros, où Patrick Martin, le président du Medef, a profité de son université d’été, à la fin du mois d’août, pour faire la leçon au gouvernement. Déplorant la « gestion défaillante des finances publiques », le patron des patrons a insisté sur la nécessité de mieux « maîtriser les dépenses de l’Etat »… en les diminuant, bien sûr. Enfin, pas toutes : car la puissance publique finance, pour plus de 250 000 euros, l’université d’été du Medef, ce que les patrons se gardent bien de claironner.
Une quinzaine de ministères, établissements publics, régions et autres organismes chargés d’une mission de service public ont, en effet, sorti le chéquier pour sponsoriser la Rencontre des entrepreneurs de France (REF). Désignés sur les plaquettes publicitaires du Medef comme des « partenaires », les soutiens sont classés en fonction d’un package de prestations qu’ils ont achetées auprès de PublicisLive, la boîte chargée de l’organisation.
Figurent ainsi dans la catégorie « Silver » l’Association pour l’emploi des cadres (Apec), la Banque publique d’investissement (Bpifrance), la Mission French Tech (rattachée à Bercy), France Travail et l’Urssaf. Selon un document interne tombé dans le bec du « Canard », ces veinards ont disposé d’une surface d’exposition de 12 m2 dans le village des stands et d’« une interview de six minutes enregistrée au studio podcast ». Tout ça pour la modique somme de 30 000 euros hors taxes (HT) par partenaire !
Pour ceux qui se trouveraient un peu contraints en ces temps d’économies, le statut « Bronze » permet, lui, de profiter d’un petit stand de 6 m2 moyennant 10 000 euros HT. Une misère qui a séduit, entre autres, l’association pour la garantie des salaires (AGS), la Caisse des dépôts, la Direction générale des douanes de Bercy et le ministère du Travail, qui indique au « Canard » avoir « mutualisé son stand avec France Travail et la Caisse des dépôts » sans préciser le prix finalement payé.
Au tarif de base s’ajoutent, bien sûr, les suppléments. Réserver une table pour dix convives lors du « dîner des partenaires » du 27 août a coûté 3 900 euros HT – un peu moins que la location du Sky Bar, avec deux hôtesses d’accueil pour offrir à ses invités, deux heures durant, « une parenthèse premium ». Les musts ? Une interview sur le plateau TV de la REF 2025 diffusée sur les réseaux sociaux (5 000 euros HT les dix minutes) ou la publication d’un « post de contenu message sur les réseaux sociaux du Medef » (3 500 euros HT). Gare aux achats compulsifs ! Ce genre de tentations fait vite grimper la note. Ainsi, la région Hauts-de-France, présidée par Xavier Bertrand, a, cette année, dépensé 23 000 euros, un tantinet plus que son statut « Bronze » le prévoit.
Le Medef précise qu’« il y avait 14 partenaires publics à la REF 25, dont la plupart le sont depuis de nombreuses éditions ». Mais, pour l’AGS, la Cellule d’aide aux blessés de l’armée de terre (Cabat), la Caisse des dépôts, la Direction générale des douanes, Erasmus+ et le ministère du Travail, il s’agissait d’une première participation, en dépit des économies budgétaires.
La preuve que l’Etat sait arroser les patrons – y compris sur la terre battue de Roland-Garros.