Des soutiers à BFMTV

Pour éviter de payer les primes et avantages auxquels ont le droit ses journalistes basés en région, la chaîne d'information en continu passe par une agence de presse qui les paie au lance-pierre. Une pratique strictement illégale.

Nouveaux décors, nouveaux programmes, mais vieille (mauvaise) habitude… BFMTV sous-traite l’information dans le but de faire des économies. Pour ce faire, la chaîne d'info, propriété de Rodolphe Saadé − le patron milliardaire de CMA CGM − depuis un an, fait appel à des journalistes extérieurs.

Correspondants régionaux, ces galériens travaillent exclusivement pour la chaîne, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, mais sont payés par une société-écran, AIMV, une agence de presse basée à Bordeaux. « Le seul contact que j’aie eu avec AIMV, témoigne l’un de ces soutiers de l’info, c’est lorsque j’ai signé mon contrat. Ils m’ont fourni une caméra et son pied, un véhicule, et c’est tout. Pour le contenu éditorial, c’est avec la rédaction de BFMTV que je traite. » Selon « le chiffre d’affaires clients » d'AIMV, BFMTV verserait chaque année entre 800 000 et 900 000 euros à cette dernière pour éditer des fiches de paie !

Concrètement, les « vrais » correspondants de la chaîne en région perçoivent une prime pour horaires décalés (925 euros par trimestre) ; une pour « astreinte » (169 euros par mois) ; une autre pour « travail à domicile » (333 euros par mois) ; une autre, encore, pour « droits d’auteur » (400 euros mensuels) ; plus l’équivalent d’un 14e mois de salaire correspondant à l’intéressement et à la participation, sans compter les 900 euros pour acquérir… un vélo électrique ! Et les autres ? Rien de tout cela. Ils n’ont même pas eu la possibilité de quitter la chaîne en faisant jouer la clause de cession (qui permet à un journaliste de percevoir des indemnités de départ en cas de changement de propriétaire) lors de l’arrivée de Saadé.

Pour contester cette différence de traitement, deux journalistes, au moins, ont saisi les prud’hommes. Un troisième vient de solliciter le procureur de Toulouse, qui, en juin dernier, a ouvert une enquête pour des pratiques du même genre visant « La Dépêche du Midi ». Ça devient une habitude ?

Source : https://www.lecanardenchaine.fr/medias/51764-des-soutiers-a-bfmtv