La malbouffe et les médias : quand la télévision joue les complices des industriels
La télévision, cette boîte à penser sur laquelle tout le monde dit que c'est de la merde mais que les gens regardent quand même. Mais derrière cet outil de diffusion de l'information dont Joseph Goebbel n'aurait même pas rêvé : elle est devenue l’alliée zélée des industriels de la malbouffe. Chips, sodas, bonbons et autres saloperies alimentaires s’invitent dans les foyers par le biais d’un marketing brillamment orchestré le tout basé sur des décennies de recherche fondamentale dans les neurosciences. Et devinez quoi ? Les enfants en sont les cibles privilégiées, ou plutôt devrais-je dire victime.
Un matraquage publicitaire bien huilé
Les chiffres donnent le vertige. Plus de 50 % des publicités alimentaires vues par les enfants concernent des produits classés D ou E par le Nutri-Score, soit les pires en termes de qualité nutritionnelle. Pire encore, ces publicités ne se contentent pas d’apparaître pendant les programmes jeunesse (où elles sont parfois interdites sur les chaînes publiques grâce à la loi Gattolin de 2016). Non, elles s’infiltrent surtout dans les créneaux familiaux, entre 19h et 22h, lorsque toute la famille regarde la télévision. À ce moment-là, près de 20 % des enfants sont devant l’écran, absorbant en moyenne neuf minutes de publicité lobotomisante chaque jour. Et devinez quoi ? Ces spots sont souvent pour des fast-foods, des chocolats ou des sodas.
Mais pourquoi s’arrêter là ? Les chaînes privées et les plateformes numériques ont compris qu’il y avait encore plus à gratter. Les influenceurs sur YouTube et TikTok vantent désormais les mérites de snacks ultra-transformés avec autant d’enthousiasme qu’un enfant découvrant un Happy Meal. Résultat : les jeunes consomment 26 % de calories supplémentaires après avoir été exposés à ces contenus.
L’art de séduire les plus jeunes
Les industriels ne manquent pas d’imagination pour séduire leur audience juvénile. Mascottes rigolotes, jingles accrocheurs et partenariats avec des jeux vidéo populaires comme Minecraft ou Fortnite : tout est bon pour capter l’attention des enfants. McDonald’s, par exemple, associe ses menus pour enfants à des jouets ou des personnages de films populaires, créant ainsi une association émotionnelle durable entre leurs produits et le plaisir. (Et cela est terriblement efficace car comme beaucoup d'enfants j'en ai été la cible si ce n'est même la victime)
Les advergames (jeux vidéo promotionnels) et concours sur TikTok permettent aux marques d’interagir directement avec leur cible. Imaginez un enfant qui fait un selfie avec son paquet de chips préféré pour gagner un an de malbouffe d’approvisionnement gratuit. Comment résister à une telle proposition ? Spoiler : ils ne résistent pas.
Les conséquences : un problème de santé publique
Ce matraquage publicitaire n’est pas sans conséquences. En France, un enfant sur six est en surpoids ou obèse. L’exposition continue à ces publicités crée des préférences alimentaires délétère dès le plus jeune âge. Et ce n’est pas qu’une question d’esthétique : ces habitudes augmentent significativement le risque de maladies graves comme le diabète ou les maladies cardiovasculaires.
Les experts sont unanimes : cet environnement "obésogène" doit être combattu à la racine. Pourtant, malgré les appels répétés d’organismes comme l’OMS ou Santé Publique France pour encadrer davantage le marketing alimentaire, les gouvernements successifs ont préféré miser sur l’autorégulation des industriels. Et vous savez quoi ? Ça ne marche pas.
Quand la télévision fait mine d’être innocente
Et que font nos chères chaînes télévisées dans tout ça ? Elles jouent la carte du "on ne savait pas". Pourtant, elles encaissent grassement leur part du gâteau : en 2018, l’industrie alimentaire a investi 1,1 milliard d’euros en publicité en France, dont près de la moitié pour promouvoir des produits malsains. Les chaînes prétendent respecter une charte éthique (coucou l’ARCOM), mais cette dernière est aussi efficace qu’un parapluie dans une tornade.
Et si vous pensiez que la suppression des pubs pendant les programmes jeunesse allait changer quelque chose… surprise ! Ces émissions représentent moins de 0,5 % du temps télévisuel regardé par les enfants. Autrement dit, c’est comme interdire l’alcool dans une seule rue d’une ville entière.
Des exemples concrets qui donnent à réfléchir
Prenons le cas emblématique du géant Monster Munch qui a investi TikTok et Discord pour promouvoir ses chips auprès des jeunes joueurs. Ou encore celui de Kinder qui utilise ses œufs en chocolat dans des jeux interactifs en ligne. Ces campagnes ne se contentent pas de vendre un produit ; elles créent une expérience mémorable qui s’ancre durablement dans l’esprit des enfants.
Et que dire des influenceurs ? les stars des réseaux sociaux partagent leurs snacks préférés avec leurs millions d’abonnés mineurs sans même mentionner qu’il s’agit souvent de placements sponsorisés. Résultat : une génération entière grandit en croyant que manger un paquet de chips devant Netflix est non seulement normal mais cool.
Ironie du sort : quand tout le monde regarde ailleurs
Face à cette situation alarmante, on pourrait penser que nos dirigeants prendraient enfin leurs responsabilités. Mais non ! Les propositions visant à encadrer strictement ces pratiques ont été systématiquement rejetées ou édulcorées au fil des années (loi EGAlim en 2018, réforme audiovisuelle en 2020…). Pendant ce temps-là, nos enfants continuent d’être bombardés par ces messages toxiques.
Un avenir croustillant… mais salé
La complicité entre chaînes télévisées et industriels est flagrante. Mais pourquoi s’en étonner ? Après tout, rien ne vaut une bonne dose de sucre et de gras pour fidéliser un consommateur dès son plus jeune âge. Alors parents, préparez-vous à jouer au gendarme alimentaire encore longtemps… ou jusqu’à ce que nos décideurs se décident enfin à agir.
Mais restons optimiste :
Je terminerai par une note d'optimisme : l'impact de l'industrie agroalimentaire et le conditionnement à la consommation de ces produits malsains chez les plus jeunes peuvent être en grande partie évités en limitant le temps passé devant les écrans. Cela réduit l'exposition des enfants à la publicité et aux médias, notamment numériques. Et si vous vous en sentez capable, vendez votre télévision ou jetez-la à la poubelle. De toute manière, vous vous sentirez bien mieux après.
En attendant, bon appétit !